GROUPE: RüYYn
TITRE ALBUM: Chapter II : The Flames, The Fallen, The Fury
LABEL: Les acteurs de l’ombre productions
DATE DE SORTIE: 2023
Comment un seul homme peut-il réussir à écrire et composer une musique aussi riche et enivrante quand tant de groupes à trois, quatre cinq ou sept n’arrivent pas à faire décoller un sourcil à ceux qui tombent sur leurs notes ?
Parce que jouer de la musique avec la meilleure technique et la meilleure dextérité du monde, ne fera jamais de l’instrumentiste un bon compositeur…Et ici c’est la fluidité dans l’inspiration qui entoure le pouvoir de composition de RüYYn et le résultat est juste maléfique.
Sorti fin 2023, ce second chapitre, mais premier album de Romain Paulet (seul aux commandes de tout) , est surprenant de talent et d’idées noires qui s’imposent d’elles-mêmes. Fort du premier chapitre qui a fait courber l’échine de tous ceux tombés sous son joug, ce deuxième chapitre devrait mettre à genoux bon nombre de têtes aux oreilles décollées qui jamais ne mettront en doute la capacité de RüYYn à écrire des albums d’une grande valeur musicale.
Et si la chronologie de l’histoire se situe ici bien avant le chapitre I, la maturité de RüYYn est paradoxalement palpable sur cet album, son évolution étant en marche ; et l’on se retrouve à succomber plutôt rapidement dès la première partie de l’album.
La tendance s’est inversée chez les Acteurs de l’ombre sur les dernières sorties, on y retrouve aujourd’hui plus de groupes dont le black metal aussi torturé qu’il puisse être avec l’état d’esprit actuel, puise ses inspirations dans le black metal des années 90’s, avec cet esprit combatif, cette attitude noble et solitaire plus que délurée et déboussolée (de ces dernières années) , montrant moins une facette de pleureuse qu’un visage d’une noirceur impitoyable.
RüYYn fait partie des groupes qui redonnent un sens au mot black metal en 2023/2024, bien qu’il évolue comme toute chose.
« Chapter II... » de RüYYn, possède cette musicalité qui vous pousse vers les ténèbres, d’une manière sournoise, parce que l’album ne possède que six parties et on aurait tendance à croire que cela va être long et douloureux, mais en fait sa durée de quarante deux minutes lui donne une force et une pertinence incroyable.
Il s’agit d’un album que l’on écoute dans son entièreté, sans jamais s’arrêter pour , d’abord ne pas perdre le fil de l’histoire émotionnelle qui s’installe au fur et à mesure des chapitres, mais aussi parce que tout est imbriqué, indissociable, avec des temps différents qui offrent dans l’ensemble une atmosphère très solennelle.
RüYYn réussit à vous faire pénétrer dans sa pochette à mesure que vous avancez dans son album, la violence des riffs ne l’est plus, elle pénètre votre âme comme l’encre d’un tattoo pénètre votre peau pour ne faire plus qu’un avec vous, comme s’il en avait toujours été le cas.
Pour asseoir sa puissance la première partie de cet album s’installe tout de suite dans la violence pour assez rapidement montrer sa noblesse , toujours sur le même titre. Il en sera toujours de la sorte jusqu’à la fin de l’album. La voix ne pleure pas comme une âme en peine fragile, non, Romain hurle sa rage sur une musique épique , parfois presque martiale où les claviers se posent pour consoler l’auditeur. Mais RüYYn ne vous laisse guère le temps de vous accoutumer, car les changements de thèmes sont légion ce qui donne à l’ensemble de l’album cette couleur terne de désespoir. Pourtant jamais RüYYn ne se laisse glisser vers la complainte du chouineur , non c’est l’esprit guerrier qui prédomine, on le ressent comme un voile vitreux au dessus de la tête, sur tous les chapitres de l’album. Et cette production, voulue ou pas, nous rappelle un peu celles des Aeternus sur « Beyond the wandering moon » leur premier album ou encore Hades sur « The dawn of dying sun », très roots, rauque avec du relief caché sous couverture.
Chaque titre est magistral que ce soit les passages basse/batterie seuls, les lead guitares, les ambiances, les atmosphères, tout a été pensé pour que la musique devienne réelle, pour que l’immatériel devienne matériel et rares seront les albums qui appartenant à la décennie 2020/2029 qui pourront se targuer d’avoir cette force.
Chaque titre est époustouflant de puissance, de haine et de profondeur. Sans revenir en arrière on retrouve la grandeur de ce qui a fait le black metal, tout en ayant conscience que cela se construit sur les ruines d’un passé incompris aujourd’hui.
RüYYn va vite, RüYYn vous emmène sur le champ de bataille avec des mélodies nébuleuses et embrumées qui vous donneront toujours le frisson avant que le ralentissement retentisse. En cela Romain Paulet est intelligent car il se souvient comment les anciens accéléraient vraiment pour mieux changer l’ambiance de mort en brouillard épais mélancolique. On découvre cet album avec beaucoup de respect et d’étonnement, car chaque partie possède une personnalité singulière , allant presque dans la musique progressive/atmosphérique black sur la partie IV.
Peu d’albums sortent du lot depuis quelques années, et en matière de black metal, lorsque l’on retrouve pourquoi l’on a aimé ce mouvement musical quand c’est arrivé, il faut le souligner. RüYYn a écrit un album d’une profondeur sans fin , on ne peut passer à côté d’un tel album.
21/01/2024
Arch Gros Barbare