Groupe : LOUDBLAST
Titre : Altering Fates And Destinies
Label : Listenable Records
Année : 2024
Ne soyons pas hypocrites, beaucoup d’amateurs de death metal ont lâché en route LOUDBLAST depuis longtemps, et bien que ce groupe français soit l’un des plus vieux et des plus reconnus groupes du podium « de quatre » du death metal français avec Mercyless, Agressor et No Return, il a souvent fait l’objet de critiques objectives ou subjectives, peu importe, quant à la portée de ses albums. LOUDBLAST divise, entre les inconditionnels, puis les mitigés par rapport à chaque sortie et enfin ceux qui, quoiqu’il arrive n’aimeront pas, même si c’est bien foutu.
C’est vrai que les darons du légendaire « Licensed to thrash » avec Agressor, avaient écrit un « Sensorial treatment » respecté parce que l’époque, parce que le premier, mais pas forcément pour autre chose, alors qu’ à côté de celui-là, le double combo « Disincarnate » / « Sublime Dementia » et « Cross The Threshold » / « The Time Keeper » le live d’anthologie, sont devenus des références parce que LOUDBLAST a tout de même écrit à cette époque des albums qui sont gravés dans le marbre français, quoiqu’on en pense.
Et c’est ensuite que LOUDBLAST a encore plus divisé avec le très bon mais déjà très changeant « Fragments » et le très particulièrement dissident « Planet Pandemonium » qui a définitivement divisé la fan base du groupe et les futurs aficionados. C’est sans doute pour cela que l’écart de temps avec « Frozen Moments Between Life & Death » aura été le plus grand de leur carrière malgré tout, pour un retour en fanfare avec une pochette de nouveau signée Bolek Budzyn en souvenir de la grande époque de « Sublime Dementia », sur un album qui s’en est bien sorti tandis qu’en 2011 la scène death metal française était déjà en plein expansion qualitativement parlant depuis un bon moment.
L’écart s’est creusé, beaucoup sont partis, mais tout de même pas mal sont restés, parce que les riffs de « Cross the threshold » résonnent à jamais dans l’âme des deathsters français , ainsi que « No tears to share », « Subject to spirit », et beaucoup d’autres.
Trois ans plus tard sortait le très sombre « Burial Ground », pas mal boudé mais pourtant très noir et très roots, un album en soit plutôt bon, pour six ans plus tard laisser la place au controversé « Manifesto » qui comme beaucoup dans l’air du temps, montrait patte blanche avec une pochette signée Eliran Kantor (Testament, Helloween, Sepultura, Kreator...L’air du temps)
Un album qui, soyons honnêtes n’a pas fait l’unanimité du tout.
A partir de là, compliqué d’être entièrement objectif sur la qualité d’écriture de LOUDBLAST pour qui suit la carrière musicale du groupe, avec un œil relativement neutre, ni trop fan, ni trop critique. Et donc très sceptique sur ce nouvel album , dont la pochette signée ici par Stefan Todor, sur des tons oranges et rouges, donnait pourtant un côté nouvellement majestueux à LOUDBLAST.
L’habit ne fait pas le moine, et une pochette magnifique ne fait pas non plus la qualité d’un album. Et donc alors que les deux premiers morceaux de l’album sortaient, on pouvait réfléchir à la véritable qualité de ceux-ci, sur « From beyond II», en réponse au premier « From Beyond » de « Sensorial treatment », comme a pu le faire Metallica avec « The Unforgiven » 2,3,666… un titre passe partout, par forcément rentre dedans et en fait sommes toutes plutôt basique.
Après est arrivé « Putrid Age Of Decay » en vidéo officielle qui rappelait « Emptiness Crushes My soul » le solo de dingue et le lead guitare en plus.
Et donc avec ça , il fallait se faire une vision de la chose, puis est arrivé l’écoute entière de l’album. Et là : révélation. Bordel de bordel, LOUDBLAST a écrit un album réellement puissant, original, audacieux par rapport à ce qu’il a pu écrire depuis quelques années ! La pochette habille à merveille cet album qui respire la noirceur, mais surtout une authenticité qui avait été oubliée depuis quelques années chez LOUDBLAST et une inspiration réellement grisante. Alors fruit du hasard, les deux premiers titres de l’album sont ceux qui ont été jetés en pâture, mais sans l’ombre d’un doute, ce ne sont pas les meilleurs.
Un album de dix morceaux, plus trois bonus pour le digipack, qui en fait, c’est vrai , commence à bien balancer à la fin de « Putrid Age Of Decay » car plus on l’écoute, plus il fait son taff et donne envie d’y retourner rapidement. Et son statut de pas meilleur morceau, double les autres aussi rapidement.
En effet ce nouvel album pour lequel beaucoup n’attendaient rien, fait son entrée dans la fosse death metal française et internationale, où il est difficile aujourd’hui d’y survivre. Pourtant voici un nouvel album qui redonne rapidement un nouvel élan et un bol d’air frais à LOUDBLAST, parce qu’il fait partie du haut du panier de leur discographie, même s’il vient de sortir. A cela ajoutons la présence maintenant de Frédéric Leclercq, qui a joué chez tout le monde de connu, et surtout qui joue toujours chez Kreator, et on a un recette implacable pour quarante trois minutes d’un death metal épique, tantôt violent, mais souvent mid-tempo et ténébreux.
« A crystal Skin » met la branlée par son côté opaque et visqueux, tandis que « Miserable Failure » renforce la puissance de LOUDBLAST avec des vocaux très travaillés, modulés et peut-être arrangés, en offrant une facette proche du death metal à la Behemoth, ce côté satanique et froid à la polonaise.
De là, l’enfilage des titres est d’une facilité déconcertante, ça s’enfile comme des perles sur un fil doré, « He Who slumbers » prend des airs de folie meurtrière orchestrale , quand « Son of Nameless Mist » rend encore plus exotique la sonorité générale de l’album. LOUDBLAST se réinvente, sans perdre son âme et le fait bien, ils ont osé et ils ont réussi. Tout dans cet album mérite d’ôter son chapeau et de saluer. Les ambiances, les atmosphères sont lourdes, elles sont parfois oppressantes, elles sont death et encore une fois très épiques, ce qui fait que l’album s’écoute comme une fresque qui se déroule sous nos yeux, ou plutôt nos oreilles, mais permettant de nous offrir l’imagination qui va avec.
On sent l’envie de poser un décor, et de dessiner les détails en prenant le temps qu’il faut pour que rien ne soit laissé au hasard. Et si la brutalité n’a jamais été le fort de LOUDBLAST, la profondeur abyssale dont ils font preuve est omniprésente depuis quelques années. Il faudra arriver jusqu’à « Cursed and veiled » pour avoir du sale mélangé à du psychotique, petite marche pour monter facilement au palier de « Fortress » . Parce que ce dernier titre officiel de l’album aussi le plus long, est certainement le plus audacieux. Il est fou , pachydermique, sociopathe et excentrique. On y retrouve la lenteur de Gojira, sur un esprit très grec et presque symphonique. LOUDBLAST s’amuse et se laisse complètement aller sans se donner aucune limite pour refermer ce nouveau chapitre d’une manière majestueuse, une espèce de marche funèbre qui ferme la boucle. Et si vous possédez le digipack, sur les trois bonus, vous aurez « Forbidden Pleasure, » petite reprise de Necrophagia qui viendra remettre les pendules à l’heure et vous rappeler que LOUDBLAST est un groupe de death metal français dont les racines sont bien death .
Voici un album terrible que LOUDBLAST nous offre, un album très personnel, mais aussi extrêmement bien écrit qui fait partie sans conteste des meilleurs albums de leur carrière.
Arch Gros Barbare
01/11/2024