SPHERE -Blood Era-

Groupe : SPHERE

Titre : Blood era

Label : Deformeathing Production

Année : 2022

Il y a bon nombre d’années pour ceux qui savent encore compter, dans les cours de collèges et de lycées, les filles pouvaient lire des magazines pour résoudre leurs problèmes existentiels et dévoraient des yeux toute la mode qu’on leur mettait à portée d’iris. Les « Jeune et Jolie » et autres « 20 ans » étaient légion, pendant que d’autres admiraient les pochettes d’albums et les photos de groupes sur les mags de hard et autres Metal Hammer.

Tout ceci pour parler de l’importance du format physique et du plaisir que cela procurait de tenir ça entre nos mains. Et une pochette qui attire l’oeil avait son importance, puisque combien d’entre nous ont acheté un album juste grâce à sa pochette ?

C’est ce que mettent en avant les polonais de SPHERE qui après vingt ans d’existence , sortent de leur tranchée et arrivent jusqu’à nos frontières pour présenter leur quatrième album « Blood Era ».

Et force est de constater que toutes les attentions ont été concentrées sur cette pochette, le livret en entier et la mise en place de tous les éléments. Avec une précision d’horloger suisse, Perversor « Cursed Art » a posé immédiatement une noblesse visuelle sur ce « Blood Era ». Et le contenu est magnifique, ajoutons à cela que Deformeathing Production se paye le luxe de remettre au goût du jour les éditions fourreau, c’est terriblement exquis et raffiné.

Et raffinée c’est exactement ce qu’est la musique de SPHERE, car ses membres ont une expérience longue comme une liste de promesse gouvernementale, et leur death metal est teinté autant de modernisme que de traditionnalisme et de technique, de fluidité, de brutalité, que de mélodies violentes. Sans compter, qu’à l’instar de la scène finlandaise, la scène polonaise de ces vingt dernières années, fait montre d’une puissance sonore sans faille. Et SPHERE confirme cela.

« Blood era » c’est neuf chansons dantesques, brutales dans leur ensemble, mais qui puisent un peu dans l’escarcelle de pas mal de millieux.

D’abord parce que leurs titres sont la plupart du temps mis en valeur grâce des samples ou des claviers , on s’en aperçoit immédiatement sur l’intro de « The age of contempt » qui fait entrer l’album par la grande porte, ou encore « Blood Era » qui fournit au morceau une majesté sans égal. SPHERE propose un death metal aussi puissant que celui de Vital Remains à l’époque de « Forever underground » et « Dawn of the apocalypse », ce n’est d’ailleurs certainement pas innocent si sur « Conquer the christians » le sieur Dave Suzuki vient poser en guest un solo de papa à l’école des fans ; bien que ce ne sera pas le seul guest car Damien Boynton (Desolation US) y donnera lui aussi de sa participation vocale.

SPHERE joue dans la cour des grands, et va balancer sa balle dans tous les coins de cette cour pendant la récréation. Avec « Conquer the christians », le groupe envoie sa technique à la face du monde puis développe un propos ultra rapide avec « Blood era » qui prend presque des airs black metal au beau milieu d’un death brutal. La voix de Visnia possède cette gutturalité rare chez les vocalistes de death metal, une profondeur caverneuse qui donne à la musique de SPHERE une incommensurable capacité destructrice.

On se retrouve dans des mondes différents, toujours death metal, mais à chaque morceau son univers ; « Eternal war » et « Scars of sanctity » vont chercher le blackened death des Behemoth dernière période, tandis que « Heralds of Pestilence » se rapproche de Hate, alors que sur certains morceaux on y retrouve au niveau des guitares la folie schizophrénique d’un Dying Fetus de « Reign supreme ».

C’est ici que SPHERE nous surprend, cette aptitude à prendre à son compte de multiples identités pour égarer l’auditeur dans les meilleurs conditions. Ça le fera sur « Scars of sanctity » beaucoup plus traditionnelle , avec une atmosphère là aussi plus blackened death sur les guitares, plus posée, et démoniaque à la fois.

Et c’est véritablement sur des titres comme « I am death incarnate » et « Nails » que les mélodies seront définitivement plus ténébreuses que le reste de l’album, toujours dans une intense hargne. Jusqu’au bout SPHERE aura tout calculé.

Cet album est parfait, il conjugue puissance noirceur, technique mais aussi une formidable rage de destruction et après autant d’années c’est certainement quelque chose à saluer bien bas et qui inspire un grand respect.

Arch Gros Barbare

22/04//2023