FAIRYLAND -Interview- 04/10/2020


09 octobre 2020

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FAIRYLAND ou l’histoire d’un monde riche en émotions, en personnages, en fantaisie qui dure depuis plus de vingt ans si l’on englobe sa forme originelle. Originaire de la côte d’Azur FAIRYLAND représente le fleuron de la scène power metal française et avec un nouvel album «Osyrhianta », sorti cette année après onze ans de silence. Entretien avec Philippe Giordana (claviers)

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Une carrière longue, car depuis 1998 et Fantasia, la pluie a bien coulé sous les ponts, les scènes se sont multipliées, les styles se sont épurés, modifiés, se sont développés et la musique a muté. Mais l’on constate que FAIRYLAND est toujours présent après tout ce temps, et même s’il aura fallu onze ans pour que naisse « Osyrhianta », vous êtes de retour.

Comment a-t-on encore l’envie de réaliser un nouvel album après onze ans de silence, d’attente ? Est-ce qu’il fallait ce temps pour se poser de bonnes questions, pour se remettre en question parfois ou simplement pour vivre avant FAIRYLAND, qui a dû, au cours de ces années, être relativement chronophage ?

Salut ! Pour l'envie, je dirais qu'elle est toujours présente, dans les périodes hautes comme les basses. Après, c'est l'inspiration qui peut manquer par moment, mais ce n'était pas le cas pour « Osyrhianta ». L'attente et ce long délai avant la sortie sont dus à plusieurs facteurs. Santé, famille, enregistrement... le pataquès habituel, en gros. Il y a eu aussi une longue période de réflexion sur le concept lui-même, qui m'a poussé à revoir certains titres. Et un peu de flemme parfois, j'avoue.

_jlp2932_resultat.jpg (27 KB)Avec le temps, il y a eu quand-même quelques mouvements de line-up, des départs, des retours, des re-départs... Est-ce qu’à un moment, cela peut affecter l’identité musicale d’un groupe, de votre groupe ? Que ce soit en matière de composition évidemment, mais en matière de couleurs, vu les horizons différents des nouveaux membres, les projets à côté comme pour Francesco Cavalieri et Wind Rose ? Qu’est-ce qui anime FAIRYLAND : la musique ou l’amitié ? Quelle est alors votre vision du groupe en tant que tel ?

L'identité musicale reste sensiblement la même. On commence à avoir l'habitude des changements de line-up :D. Il y a eu des ajouts importants venant de Francesco, Sylvain, et JB. Sans mentionner Camille, Flora et Victoria qui ont fait vibrer cet album comme pas possible. Le cœur de Fairyland, c'est avant tout Willdric et moi, et c'est basé sur une passion mutuelle pour le metal, le sympho, le fantastique, depuis plus de 20 ans. Mais aussi sur une forte amitié, que l'on partage aussi avec les autres membres. Francesco et JB ont d'autres projets qui leur prennent beaucoup de temps, les empêchant de suivre notre route, mais leur remplacement est en bonne voie (j'ai dit, on a l'habitude). Le groupe, c'est avant tout la musique qui en ressort. Le faire avec des potes, c'est quand-même vachement mieux !

_jlp2944RT_resultat.jpg (30 KB)Les changements de guitaristes, ok ! Mais la couleur vocale d’un groupe, c’est tout aussi important. Si FAIRYLAND a bien évidemment signé tous ses albums d’une personnalité musicale particulière, n’est-ce pas trop compliqué, quelque part, de ne jamais avoir eu le même vocaliste toutes ces années pour chaque album ? Et pourtant, Elisa C Martin est toujours présente, plus que jamais à vos côtés, pour réaliser des guests voire même faire de la session en tournée je suppose, au cas où ?

Je peux comprendre que les changements de voix soient un peu, comment dire, pleins de confusion. Une partie des raisons pour ces changements vient de la disponibilité (et distance) des chanteurs. Elisa, Max, Marco et Francesco ont tous donné de belles performances qui ont soudé les albums sur lesquels ils/elles ont participé. Après, Osyrhia étant un concept, une histoire, je pense qu'avoir des narrateurs différents est assez pertinent. Et yep, Elisa revient pour la scène et le studio.

C’est marrant parce qu’on vous a bien souvent comparés à Rhapsody ; pour ma part, plutôt par erreur, car la première chose que l’on entend chez FAIRYLAND, c’est la richesse d’un Blind Guardian, tant dans l’esprit que dans la musicalité, cette atmosphère divine de fantasy... Et le rapport avec ce groupe en particulier est de quelle teneur, parce que c’est vrai que les années passant, Blind Guardian n’est plus trop sur les lèvres de tout le monde avec ce qu’ils ont écrit, passées les années 2000 ?

Euh, merci du compliment ! Effectivement, beaucoup de Blind Guardian en inspiration, surtout après Of Wars in Osyrhia. BG reste à ce jour mon groupe de metal préféré. Un gros paquet de ce qu'est devenu Fairyland vient du travail qu'ils ont effectué sur Nightfall in Middle Earth. Je ne pense pas avoir écouté auparavant un groupe de metal qui a réussi à lier la musique et le concept de cette façon. Plein d'autres ont essayé, mais c'est cet album qui me parle le plus. Je vais m'arrêter avant de sortir une thèse universitaire sur le sujet.

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Avant de parler du dernier album, j’aimerais encore juste poser deux petites questions : la première est qu’étrangement, le « heavy power symphonique », étiquette bien longue pour qualifier finalement une musique, a ses fans en France, certes, mais s’exporte plus facilement à l’étranger. J’ai cette sensation tout de même plutôt réelle, que FAIRYLAND a aussi plus de fans, que ce soit en Europe, ou au Japon, qu’en France. Comment vous expliquez cela ?

C'est sûrement culturel. Pour le Japon, par exemple, j'écoute souvent certaines OST d'animés, et je retrouve ce côté sympho qu'on n'a plus l'habitude de rencontrer en France. Plus l'habitude, parce que fut un temps, on était fort là-dessus (Vladimir Cosma, les arrangements de Charles Aznavour sur Emmenez-Moi, et pleins d'autres). Chez nous, c'est plutôt l'autotune qui prévaut ces dernières années. Après, je suis ni psychiatre, ni musicologue, donc je sais pas. Demande à la Finlande ? XD

_jlp2906_resultat.jpg (34 KB)Ensuite votre premier album est sorti chez NTS, une division de Wagram, puis deux chez Napalm Records, et enfin maintenant chez Massacre. Pour ce qui est de l’Europe, cela confirme sans doute la première impression, même si Wagram est français, mais avec un angle de vue européen. En regardant derrière, est-ce que ces signatures ont aidé FAIRYLAND à avoir plus de visibilité par le passé, est-ce que même si vous avez bossé dur pour écrire et réaliser ces quatre albums, ces signatures en particulier ont aidé FAIRYLAND à ne pas rester coincé dans la nasse mais aussi à tourner avec des groupes prestigieux comme Kamelot ?

Je vais faire dans l'ordre :

NTS nous a signés pour le 1er album. Olivier Garnier et Roger Wessier nous ont poussés sur le devant. Ils travaillaient comme une boite étrangère (donc pas comme la plupart des bras cassés qu'on a en France). On a halluciné en voyant l'organisation de notre toute première mini-tournée avec Sonata Arctica. Toujours présents et dispo, au top. Mais ils ont fermé la boite, et je sais pas si ça avait un rapport avec Wagram ou non.

Napalm : très bien organisés, bien foutus, mais à l'époque, ils n'avaient pas la même visibilité que maintenant. Ils ont refusé la démo pour « Osyrhianta », pour des raisons que j'ignore. Mais on garde de bons contacts quand même. Et un grand merci à eux et à Kamelot pour cette super tournée.

Massacre : on est encore jeune dans la relation avec le label, mais pour le moment, ils se bougent bien pour la prom et sont au taquet pour répondre à nos questions. On verra par la suite comment tout se passe.

Petit coup de gueule sur la distrib française qui, de Napalm à Massacre, est toujours aussi merdique. Non, je ne donnerai pas de noms.

_jlp2961_resultat.jpg (24 KB)Aujourd’hui, comment sont les rapports avec tous ceux qui ont quitté FAIRYLAND depuis sa genèse ? Est-ce que le temps a cicatrisé les rancœurs, est-ce que le temps a donné une autre chance aux amitiés ? Car n’est-ce pas l’humain le plus important dans tout cela ? Aujourd’hui, est-ce que FAIRYLAND est un groupe soudé ? Sans connotation financière, de notoriété ou autre, mais vraiment plus axé sur l’individu et sa manière de vivre en osmose avec les autres ?

On reste plus ou moins une bande de potes. De tous les anciens membres, il n'y a que Thomas avec qui je ne parle plus (égos démesurés d'un côté comme de l'autre, ça clashe). Max est passé me faire la bise quand il était sur la région il y a deux ans. J'ai vu Elisa pour l'enregistrement de Hamka et du morceau de Fairyland sur lequel elle est. J'ai vu Piwee aussi quand il faisait une Master Class à côté de chez moi. Tony m'appelle régulièrement à 4h du matin quand il est torché. De temps à autre, on se vanne avec Marco sur Facebook. Francesco, c'est plutôt par téléphone ou vidéo. Tout va bien pour le relationnel.

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J’ai lu que tu étais en train de réécrire entièrement le concept de FAIRYLAND en y ajoutant des dialogues et des détails, et même en créant le langage « Osyrhian ». Effectivement, si l’on compare à Tolkien comme certains ont pu le faire, le travail est conséquent. Notamment aussi sur le fait que votre nouvel album est une préquelle de ce qui a déjà été écrit... Tu en es où de ça ? Tu comptes t’y prendre comment exactement ?

En revanche, est-ce que lorsqu’on écrit un tel concept, on ne s’enferme pas non plus dans un carcan ? Je veux dire qu’à un moment, est-ce que cela ne devient pas une contrainte tant qu’on n’en a pas terminé avec ça alors que, peut-être, tu aurais eu envie de parler d’autres choses ou écrire sur quelque chose de différent, en te sentant obligé de continuer ce que tu as commencé jusqu’à ce que tu sois certain que ce soit la fin ?

Pour le langage, j'ai des difficultés, mais je travaille par correspondance avec un linguiste qui valide mes décisions. Je cherche à créer une langue harmonieuse, et c'est là-dessus que je me base pour les sonorités. Après, il y a des idées qui diffèrent de la plupart des langues « modernes », comme le temps, les pluriels, les chiffres... C'est pas une sinécure, mais ça m'aide à approfondir le concept.

Eu égard au concept lui-même, j'ai l'avantage de pouvoir réviser et corriger, voire refaire la totalité de mes idées. L'original s'est arrêté à la fin de Score to a New Beginning, mais j'ai bossé sur deux manuscrits pour la suite qui partent dans deux directions opposées. Pour le moment, je me base sur le concept original sous forme de préquelle, et la réécriture n'influence pas trop le développement de l'histoire. Quoi que...

_jlp2995_resultat.jpg (26 KB)Comment s’est passé l’enregistrement de ce nouvel album ? Est-ce que votre manière d’aborder les orchestrations et l’enregistrement lui-même, mixage, a été différente de ce que vous aviez l’habitude de faire, afin de ne pas avoir de regrets plus tard ? Car j’ai cru comprendre que tu étais en train de réenregistrer « The fall of an empire » …

Nouveau matériel, nouveau studio, nouveaux samples... Oui, on a tout revu pour le son. Mais ça n'a pas vraiment influencé la musique en soi. Par contre, effectivement, ça nous a donné une nouvelle perspective sur TFoaE, qui mérite un petit coup de boost. Et on va s'y mettre dès que la route de Lieuche est réouverte.

Tu as tout composé sur ce nouvel album sauf « Mount Mirenor », qui est un très long instrumental de plus de sept minutes, pourquoi ?

Parce que Victoria, la compagne de Willdric, est une compositrice de génie. Elle nous a fait écouter ses morceaux en version démo un soir, et on est tombé amoureux de ce thème. Il collait parfaitement avec le concept. En plus, depuis, Vic a fini son album sous le nom « Enoa », et c'est une merveille. Alors si ça colle et que ça peut la mettre en vitrine, pas de soucis :D

Avec le premier album, il y avait cet esprit cinéma avec narrations et interludes ; sur le second, il y avait encore plus d’interludes ; votre troisième album faisait encore plus B.O. de film. Alors quelle est, selon toi, la particularité de « Osyrhianta » ?

Un peu de paresse ou l'envie de venir directement au fond des choses. C'est une partie de mes regrets. Mais je pense que pour un come-back, il fallait un truc qui envoie du 44 Fillette dans la mâchoire. Ces jours-ci, je suis plus penché sur du narratif (d'où le boulot sur le concept) et je vais composer en fonction, que ça plaise ou non. « Osyrhianta » m'a par contre guidé sur des structures plus droites et compréhensibles (j'espère), donc je vais voir comment jouer avec le contraste.

Pour terminer, j’aurais voulu savoir si après la fin du monde Covid, FAIRYLAND va reprendre la route et parcourir quelques scènes ?

Oui.

Arch Gros Barbare

09/10/2020

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