
19 octobre 2020
Le heavy metal français est toujours debout, fier, brûlant, envoûtant, et tandis que l’encre coule partout en France pour parler de FURIES, nous avons réussi également à leur prendre quelques mots, pour la sortie de leur premier album « Fortune’s gate » qui a vu le jour ce mois-ci et qui explose tout sur son passage...
Photo ©SoniaBlade
Avec quelques changements en passant d’une « féminité » totale à un groupe où tout le monde semble vouloir montrer du doigt une grande mixité, en allant même jusqu’à vous qualifier de « virile heavy metal », finalement FURIES qui est à l’initiative au départ de Zaza, a trouvé son line-up bien sûr avec Lynda, mais aussi avec Billy Laser et Sam Flash, comment se passe la « cohabitation » aujourd’hui car ça fait déjà quatre ans qu’ils sont dans le groupe ?
Lynda : Salut Arch, oui à l’origine FURIES était un groupe exclusivement féminin et mené par Zaza Bathory. En 2015, un ami me dit qu’elles ont besoin d’une bassiste de session ; je suis donc entrée dans le groupe et montais en parallèle mon propre groupe. La rencontre avec Zaza fut exceptionnelle car nous avions les mêmes objectifs musicaux ; on s’est de suite entendue et le timing était parfait. Les choses ont fait que nous avions donc recruté Billy Lazer qui était déjà dans l’entourage proche de FURIES, et puis j’ai rencontré dans un bar Sam Flash. Nous étions en pleine audition et par intuition, je lui ai proposé de venir auditionner. Il s’est avéré que Sam et Zaza viennent de la même ville en banlieue et se connaissaient déjà, le monde est petit !
Pour ma part, je peux dire que FURIES démarre vraiment avec ce line-up, donc depuis à peu près quatre ans, le temps d’apprendre à nous connaître et savoir comment mettre en place le processus de composition. C’est pour cela que l’album Fortune’s Gate a eu un temps de gestation un peu long. Les rencontres entre nous et la mise en place du groupe se sont faites de manière assez naturelle, et je peux dire qu’il y a une certaine alchimie magique entre nous, une connexion rare instinctive.
Et est-ce que les garçons ont déjà joué dans d’autres formations ?
Lynda : Oui, Billy Lazer a joué dans THE FOUR HORSEMEN, un gros tribute français à Metallica en place depuis de nombreuses années et Sam Flash était guitariste/chanteur de son ancien groupe RENORAX, du flash metal (d’où son pseudo), orienté thrash metal.
Photo ©MatthiasGibello
Lynda, tu avais déjà joué dans un groupe féminin de Tribute à Maiden avec, si je ne dis pas de bêtises, Sybille de Witches ? Mais aussi dans Hemoragy, groupe de thrash aux pochettes d’albums génialissimes ; le groupe existe toujours ?
Lynda : Oui tout à fait, j’ai eu un tribute féminin à Iron Maiden qui s’appelait WOMEN IN IRON FORM, il y a de ça presque 10 ans, où j’officiais en tant que bassiste/chanteuse ! Avec en effet, Sibylle Colin-Tocquaine de Witches à la guitare, et deux Hélène à la guitare et à la batterie. C’était vraiment une super période, ce quatuor fonctionnait bien ! Nous sommes toujours en contact d’ailleurs. On avait arrêté car Sibylle voulait se concentrer sur Witches ; on s’y amusait vraiment bien et on a partagé de très bons moments dans l'insouciance ! Et dans HEMORAGY, j’y étais au poste de bassiste, du bon thrash’n roll mais le groupe a splitté fin 2014, c’est pourquoi je montais mon propre groupe à cette période ;)
Du coup, avec toutes ces préoccupations des femmes dans le metal et toutes les questions qui en découlent qu’on vous a déjà posées souvent, on en oublie l’essentiel j’ai l’impression. Le heavy metal de FURIES. Si effectivement votre heavy est vraiment bien « burné », il garde toujours une énorme personnalité mélodique tant sur les solos que les rythmiques elles-mêmes, alors, qui apporte quoi dans FURIES, parce que c’est quand-même bien agressif finalement ?
On vous parle aussi souvent de Girslchool ou Vixen, mais si le groove est omniprésent chez FURIES, on retrouve quelques bonnes recettes du thrash par endroits, ne serait-ce que dans les chœurs de « Voodoo Chains » voire certains riffs même non ?
Lynda : Oui, on nous pose pas mal de questions sur les filles dans le Metal mais pour nous, filles ou garçons, vraiment peu importe, ce qui compte, c’est l’essence même de la musique ! Nous sommes multi-compositeurs, alors généralement, les guitaristes apportent des riffs de guitare que nous arrangeons tous ensemble en répétition, il arrive aussi qu’un d’entre nous apporte tout un squelette de morceau et on travaille tous dessus. C’est variable. Cependant, j’écris tous les textes et les mélodies de chant, j’essaye de repérer quel riff pourrait être bien pour un couplet ou refrain, comment il est possible d’exploiter tel ou tel riff, d’autant plus que je dois combiner basse et chant, alors il faut que ce soit raccord !
Concernant nos influences, il y a une grosse base de Heavy Metal à la Judas Priest, et on aime tous par exemple Annihilator. Chacun y ajoute une touche prononcée un peu plus perso, comme le speed metal pour Billy avec des groupes comme Angra, Helloween, ou Yngwie Malmsteen, du thrash metal pour Sam avec par exemple Exodus, Overkill, mais aussi d’autres touches pour Zaza avec le groupe Death, Sepultura et pour ma part, j’aime bien le hard rock comme Black Sabbath et même le black metal donc des touches “Evil” sont posées par-ci- par-là ! Ce qu’on écoute se reflète sur notre musique !
Zaza : Finalement, la réponse est dans ta question. Cela fait un bon moment, des dizaines d’années au moins, que le fait d’être une femme n’a rien à voir avec le fait de faire de la musique agressive ou douce. D’autant que le fait d’être un homme n’est pas en contradiction avec la mélodie et les nuances, et une certaine sensibilité. Le line-up mixte de FURIES parle de lui-même, et les côtés les plus agressifs ne viennent pas forcément que des hommes chez nous, tout comme le côté mélodique (par exemple les superbes thèmes harmonisés que Billy et Sam nous composent aux guitares) qui n’est pas réservé aux femmes. C’est un tout chez nous, nous avons tous les quatre ces différentes facettes que nous injectons dans notre musique.
C’est intéressant de voir comme vous avez pris du temps à bien parler de la production pour annoncer votre album, à mettre en avant le travail de Bénédicte Schmitt et Dominique Blanc-Francard ; le Labomatic Studio encore plus, pas comme si c’était un des atouts principaux du groupe, mais presque… Alors qu’est-ce que le Labomatic a de plus que les autres n’ont pas, parce que l’énergie de FURIES est exceptionnelle surtout grâce à l’écriture des morceaux et à l’osmose que vous savez y mettre non ?
Lynda : Oui, nous travaillons dur à l'écriture de nos morceaux ainsi qu’à leur enregistrement. L’enregistrement permet de figer un morceau pour l’éternité et donc tous ceux qui y contribuent ont un rôle important ! C’est pourquoi nous en parlons souvent car ils ont participé à l’élaboration de cette concrétisation, tels les ingrédients d’une potion magique. Nous avons enregistré le chant, la basse, la batterie et les chœurs au Labomatic Studio qui est un légendaire studio parisien plutôt orienté “variétés”, tenu par Bénédicte Schmitt et Dominique Blanc-Francard. Le matériel et l’aura de ce studio sont remarquables. Nous avons pris soin de faire de bonnes prises son avec Igor Moreno, ingénieur du son, qui a de suite compris dans quelle direction nous voulions aller. Il a cité des groupes comme Symphony-X alors même qu’il ne savait pas que nos guitaristes adoraient ce groupe ! C’est pourquoi nous avons naturellement collaboré avec lui. Encore une histoire de connexion ! Et les prises guitares ont été enregistrées par Sam dans son home studio. Le tout réampé, mixé et masterisé par Simone Mularoni (DGM) au Domination Studio en Italie. Encore une fois, Simone a fait un excellent travail et nous en sommes très contents.
Merci de dire que “l’énergie est exceptionnelle” ; c’est ce que nous voulions transmettre avec tout ce travail !
Vous avez l’air d’être vraiment et totalement soutenus par beaucoup de monde, que ce soit la grosse presse metal comme Hard Force ou Metallian, ou encore les émissions de télé ; c’est même devenu plutôt rare un tel engouement de nos jours.
Avec toujours la tête sur les épaules, vous vous attendiez à fédérer autant avec FURIES, et faire malgré tout une grande unanimité comme celle-ci, quand le groupe s’est formé, surtout qu’on parle de vous jusqu’au Chili ?
Lynda : Il est vrai que beaucoup de monde s’intéresse à FURIES. Cela s’explique en partie par le fait que nous sommes déjà bien ancrés dans la scène Metal depuis plusieurs années et notamment moi lorsque je m’occupais de mes anciens groupes. Ainsi, j’ai pu nouer des connexions tant professionnelles qu’amicales. En parlant de mon nouveau groupe, les gens ont pu s’y intéresser et apparemment ils aiment ! Ce qui est une très bonne chose car ce n’est pas tout d’en parler ! Et avec Zaza et son travail d’attachée de presse dans la musique indépendante, nous avons pu accéder à des médias plus généralistes comme des radios nationales telles que France Inter.
Après c’est certain que la reprise de Dalida qui vous a emmené dans les studios de grosses radios a aussi peut-être certainement aidé à élargir un public qui n’est pas forcément hardos par ce côté fun.
Comment vous en êtes arrivés à reprendre un titre de Dalida sur une compil ? Est-ce que ce genre d’exercice a attiré les foudres d’une scène hermétique ou ça a été plutôt bien accueilli il y a trois ans ?
Lynda : Nous voulions reprendre un titre de variété française façon Metal et c’est alors que Zaza, grande fan de Dalida, a proposé ce titre. Pour elle, l’histoire de Dalida résonne en elle : Dalida, femme rayonnante, puissante mais aussi accablée d’histoires douloureuses et tragiques. Et quoi de mieux que le morceau “Mourir sur scène” pour nous représenter. Il a bien été accueilli, tant par les métalleux, car nous l’avons arrangé en version Metal, voir speed Metal, que par les gens qui n’ont pas l’habitude d’écouter du Metal ! Justement, ces derniers ont pu s’intéresser à notre groupe et du moment que la voix reste en mode clair et pas saturée et qu’elle respecte le morceau d’origine, ils trouvent cela intéressant voire captivant !
Bon parlons maintenant de ce premier album qui sort au mois d’Octobre 2020. En sept ans d’existence, ce qui est honorable, vous avez quand-même déjà écumé pas mal de salles, de festivals, et joué avec des groupes prestigieux comme Raven, Diamond Head, et plein de monstres français. Comment se fait-il finalement que votre premier album ne sorte que cette année ?
Parce que votre EP a déjà cinq ans, on a la sensation que tout est accéléré, rapide, quant aux concerts, mais que pour réaliser votre premier album vous avez pris nettement plus de temps, pourquoi ?
Lynda : Oui, comme je le disais, nous avons plutôt pris environ trois/quatre ans quant à l’élaboration de cet album avec le line-up avec Billy et Sam, car il s’agit du premier, le temps d'apprendre à nous connaître humainement et musicalement. Dans le même temps, nous n’avons pas arrêté les concerts car il est important de jouer et nous aimons ça !
Certains morceaux ont été écrits il y a déjà pas mal de temps non ? Quand on voit que vous jouiez « Voodoo Chains » en 2018 si je ne me trompe pas, ou encore, que « Unleash the furies » date de 2017 ?
Lynda : Oui exact, il y a des titres qui ont été composés il y a quelques années. D’ailleurs, “Unleash The Furies” et “Prince Of the Middle East” font partie de notre démo k7 (et digital) de 2017. Les titres les plus récemment composés sont “The Fortune’s Gate” et “You & I”. A vrai dire, l’album avait fini d’être enregistré en 2019 et nous avons pris notre temps afin de le sortir dans les meilleures conditions possibles, entourés de pro qui croient en nous !
Zaza : En effet, l’erreur qu’il ne faut surtout pas faire, c’est sortir un album trop vite sous prétexte qu’il nous tarde de faire découvrir notre musique. La sortie d’un album prend énormément de temps à se préparer : trouver un entourage professionnel (éditeur, attaché de presse, distributeur…). La conception entière d’une sortie, surtout en autoproduction, est un travail de titan, surtout lorsque c’est la première fois que l’on s’y attèle ! Prendre son temps, malgré notre époque où tout doit aller toujours plus vite, est la meilleure façon de mettre toutes les chances de son côté.
Vous êtes parisiens, le reste de la France est souvent en « perpétuelle confrontation » avec la capitale. J’ai l’impression que vous êtes fiers, et sans connotation péjorative, de votre proximité avec la capitale ? Je veux parler de votre pochette, du clip animé de « Voodoo chains » qui met bien en avant la Tour… Il n’y a pas un peu de chauvinisme caché dans tout ça !?
D’ailleurs qui s’occupe de vos visuels très colorés, vraiment très colorés ?
Lynda : Haha non pas de chauvinisme ni de clivage ! Nous sommes tous parisiens ou banlieusards, donc la Tour Eiffel est un symbole qui nous est proche mais cela va bien au-delà. Nous avons choisi aussi la Tour Eiffel comme symbole de puissance, et connue dans le monde entier. La pochette est en parfaite concordance avec mon texte “The Fortune’s Gate”, qui décrit notre ascension avec FURIES, qui est plutôt fédérateur que clivant, car il invite à nous suivre dans nos aventures, à s’élever ! Le Halo peut être interprété de plusieurs façons, j’aime à ce qu’il y ait plusieurs lectures possibles. Il peut s’agir d’une sorte de passage/porte empreint de magie, vers lequel nous nous dirigeons, un peu comme le couloir de la mort où il y a donc du renouveau derrière. Cela est un peu la suite “d”Unleash The Furies” où nous nous retrouvons dans notre grotte à trépigner d'impatience de sortir. Les pochettes de la démo “Unleash The Furies” et “The Fortune’s Gate” ont été dessinées par Slo Sombrebizarre, qui a su parfaitement capter nos idées, son style “comics” nous plaît vraiment, aussi pour le fait d’être représentés en tant que personnages “comics”.
Vous semblez aussi avoir une ligne directrice très old school, « Unleash the Furies » était sorti en tape, et là encore on peut souligner cet attrait pour l’affluence de couleurs qui caractérise FURIES, est-ce que pour vous le heavy tel que vous le jouez n’est compatible qu’avec le monde old school, ce plaisir que l’on retrouve dans le siècle dernier ?
Lynda : Pour le moment, nous adorons en effet tout ce qui est flashy dans les couleurs, je ne sais pas vraiment si le fait d’avoir baigné dans les 80’s y est pour quelque chose, sûrement. Quoiqu’il en soit, c’est surtout pour le rendu visuel que nous utilisons de telles couleurs, et nous les aimons bien. Nous ne sommes pas figés dans l’univers old school, bien au contraire, nous tenons à ce que cela devienne plus intemporel touchant à la modernité.
Zaza : En effet, nos influences sont plutôt sorties des 80’s et 90’s. Mais concernant la production, nous avons tenu particulièrement à faire appel à une équipe capable de nous faire un son actuel. Nous souhaitions avoir un son qui corresponde aux productions des années 2020 et ne surtout pas tomber dans le cliché trop “revival”. Nous aimons vivre avec notre temps !
Vos lignes vocales sont vraiment beaucoup travaillées, en même temps c’est du heavy, mais il y a un énorme travail vocal pour obtenir les envolées, est-ce qu’il y a eu quelques cours de pris, mais surtout quelle est la part des lignes vocales dans la construction des morceaux en fait, parce que l’on sent que ce n’est pas un simple accompagnement pour meubler ou beugler, c’est justement utilisé comme instrument à part entière ?
Lynda : Oui c’est un gros travail que d’écrire des lignes de chant qui collent parfaitement sur un riff par exemple. Mon expérience m’a beaucoup servi puisque j’écrivais aussi les lignes de chant et textes dans HEMORAGY. Je m’inspire beaucoup de la couleur musicale d’un squelette de morceau, pour écrire un thème en rapport avec les émotions qu’il donne. Ou encore, il se peut aussi sur certains refrains que je pressens certaines suites harmoniques qui feraient leurs effets ! Depuis toute petite, j’ai été baignée dans la musique par ma mère qui chantait beaucoup, jouait de la mandoline et de la guitare pour le plaisir. J’ai pas mal chanté des des jams Metal entre amis et récemment, j’ai pu prendre quelques cours de chant dans une école de musique. Sans me jeter des fleurs, certains profs étaient plutôt étonnés de ce registre vocal car il n’est pas courant, et un prof en particulier de technique a su mettre des mots sur ce que j’avais développé à force de pratiquer ! On a pu l'explorer. Mais je pense surtout que la part d’hérédité doit exister aussi pour ces facilités, puisque toute la famille du côté de ma mère qui est mexicaine, est très ancrée dans la musique et le côté artistique.
Vous envisagez de reprendre les concerts en Suède (Muskelrock) au Danemark et en France, ça reste malgré tout un très beau programme, et quand on regarde tous les shows que vous avez déjà joués, dans des bons festivals, avec des bonnes têtes d’affiches, comment vous avez réussi à accomplir et réaliser autant de dates intéressantes en n’ayant jamais sorti d’album ? Car bien souvent beaucoup d’orga ou tourneurs aiment bien savoir de quoi il retourne en termes d’épaules ou de maturité, visibilité ? Et quel est donc le programme pour 2021 alors ?
Lynda : En effet, faisant déjà partie de la scène Metal depuis de nombreuses années, les gens nous suivent dans nos différentes activités, et avec notre expérience, ils se rendent compte du sérieux de notre travail nous font confiance ! Concernant le Muskelrock, le fait que j’y aie joué avec SORTILÈGE a permis de faire découvrir FURIES avant même que l’album sorte ! Ainsi, petit à petit, nous espérons pouvoir jouer un peu partout et surtout à l’étranger, nous continuons de composer de nouveaux titres et espérons reprendre les concerts en 2021, seul l’avenir nous le dira !
Arch Gros Barbare
19/10/2020
Liens :
https://www.furiesofficial.com/
https://www.youtube.com/c/FuriesBand