16 mai 2024
GROUPE: Mòr
TITRE ALBUM: Hear the hour nearing !
LABEL: Les acteurs de l’ombre
DATE DE SORTIE: 2024
Dans la sur-individualité stagnante du monde actuel, peu importe de savoir qui sont Mòr parce qu’ils sont bien vivants, et ce premier album comprenant un ex-Sordide en son sein est quelque chose de puissant qui attire l’oreille autant que le regard. Comme pour certains films, dès la première minute, on sait que ce sera une excellente production parce que cela s’entend.
Il aura mis du temps à sortir, dix ans après la formation du groupe, c’est sans doute parce que tout ce qui doit marquer les esprits ne fera jamais partie de la culture du fast-food, et d’autres frivolités et niaiseries actuelles. Ainsi Mòr , dans son black metal ne va pas chercher à plaire en incluant les tournures trop « complaignantes » qui viennent pleurer dans les jupons de vos mères pour dire que c’est torturé, le monde du fragile n’est pas ici. Mòr fait partie du nouveau millénaire, on l’entend sur certaines mélodies comme celles de « Third Path », mais principalement le groupe conserve une rugosité très norvégienne et très siècle précédent. Ça s’entend immédiatement sur « The vanishing of matter » dont vous reconnaîtrez aisément l’influence de ce type d’abordage en plein milieu de montagnes enneigées et de forêts de sapins droits comme des I dans la brume nordique.
Mais Mòr ne se réduit pas uniquement à cette première impression flagrante sur le premier morceau de l’album, non , en effet, leur black metal est intense, violent sur la durée mais surtout possède l’âme du guerrier, celle-là même qui ne recule pas, qui se lève et fait front.
Quarante trois minutes, neuf titres avec un esprit combatif, c’est comme ça que le black metal de Mòr vient répandre son odeur. Les rythmiques sont simples mais puissantes et on s’aperçoit que les mélodies présentes sur des morceaux tels que « Eden » ou encore « Cave of shadows » , rappellent fortement les ambiances très innovantes du black metal des années 90’s. Pourtant Mòr propose la haine d’aujourd’hui, avec la colère de ces dernières années, transformée, moins cinglante et pour autant aussi ténébreuse. On retrouve sur un titre de l’album les petites nuances présentes sur les divers autres titres depuis le début de celui-ci , condensées en un seul , lorsque l’on arrive sur « The letter of Loss ». Une chanson d’une grandeur infinie qui réunit autant la violence de Mòr que la noblesse contenue dans leurs ténèbres et il lui faudra bien ses huit minutes pour pouvoir vous offrir une variation d’atmosphères noires aussi perfides.
Cet album est d’une réflexion plus que mature, avec un recul de dix ans, on retrouve d’ailleurs les intentions présentes sur « The vanishing of matter » avec le titre « Sulfur » qui représente certainement à merveille l’essence même de la musique de Mòr, car en seulement quatre minutes et trente sept secondes, Mòr montre sa putridité opaque en relation direct avec le logo de Lia Vesperale et la pochette de Sözo. Fort heureusement toute la fin de l’album est dans la même tonalité, crade, malsaine et furieuse. Le Black Metal de Mòr est la digne continuité de ce qu’aurait dû être le Black Metal des 90’s s’il avait su bien évoluer sans se perdre dans quelques évolutions à la « Oui Oui en mode Tim Burton ».
Et c’est justement quand on découvre « Sutcivni Los » qu’on s’aperçoit des intentions de Mòr, parce que la fin de morceau se rapproche de « Rødt og svart » sur « Constellation » d’Arcturus.
Ce premier album est glacial et bestial et il sait piocher exactement dans le meilleur des deux siècles, Mòr sort une œuvre complète, avec une prestance que pouvaient avoir la plupart des groupes de black metal trente ans en arrière.
Entendez la fin du monde, entendez cette heure arriver parce qu’un album de cette trempe ouvrira l’Office des Ténèbres et fera guise de glas.
Arch Gros Barbare
16/05/2024