31 janvier 2020
Groupe : VOORHEES
Titre : Chapter two
Label : Great Dane records
Année : 2020
Avec cette fameuse saga qui marqua l’esprit des amateurs d’horror movies au début des années 80’s, à l’instar de celle des Halloween et autres Freddy, Jason, sa machette en main et son masque de Hockey sur la face, demeurent aujourd’hui pour le dernier bastion de fans, une référence cinématographique, bien sûr, mais surtout un marque-page dans l’histoire d’une vie. Alors il est tellement normal que des musiciens ayant atteint l’âge de raison, aient voulu mettre ce personnage à l’honneur, que le deuxième chapitre de VOORHEES sortira évidemment un vendredi 13. Si le premier, avait pu vous sembler horrifique mais pas assez extrême, celui-ci vous terrassera.
Il contient huit morceaux de death metal traditionnel avec des gonades plus grosses que le cou de Corpsegrinder, enregistrés et mixés par Will Nosphares, et surtout masterisés par le grand Dan Swanö lui-même au Unisound. Voici de quoi faire frémir les plus pointilleux en matière de son et de visuel, avec encore une fois une illustration de Fabrice Romo, ici plus crasseuse que son prédécesseur, ce qui donne à la musique de VOORHEES un côté encore plus roots (un peu à la manière des illustrations des premiers Slayer).
Trente-neuf minutes donc, d’un death metal qui respecte effectivement les codes du genre, ambiance morbide un peu gore, rythmiques qui marchent sur de solides bases au niveau des références du style pour mieux construire une fondation massive. C’est un peu comme lorsque vous achetez votre maison, les nouvelles architectures et les nouveaux matériaux ne dureront pas dans le temps ; et VOORHEES c’est un peu le rachat de la maison de grand-mère ; elle a subi l’érosion des fêtes de fin d’année, mais en retapant la tanière d’ours, avec encore le gras au plafond, on se sent comme chez soi.
VOORHEES, c’est un peu comme ceux qui creusent le terrain, qui labourent la terre pour aplanir le sol afin que vos petits fessiers puissent s’asseoir sur des coussins en plume d’oie, c’est le maçon lusitanien qui monte les murs, pendant qu’on caresse le mat de l’architecte sur la péninsule arabique. VOORHEES bosse dans l’ombre, mais assure un travail indispensable et ce « Chapter two » a de la gueule ; la couleur du son est tout de suite un énorme atout qui permet à l’album de s’agripper à toutes les oreilles, même des plus old school et des plus hermétiques en matière de death metal.
« Chapter two » montre plusieurs facettes ; les premiers titres servent de motoculteur avec un « The lucky ones die first » dont le solo prouve encore que du metal sans solo : c’est pas du metal ; ou encore « My horror event » avec son atmosphère pleine d’hommage à Schuldiner, tant sur le début que sur sa rythmique propre (« Altering the future » rules).
On prend donc rapidement la vitesse de croisière pour admirer le paysage, tandis que le milieu d’album se permet de prendre de la profondeur et de la prestance avec « The will to kill » ce joyau brut au lead guitare mélodique captivant, qui, sans partir dans une course folle, assoit la puissance du groupe avec non seulement une atmosphère réfléchie et tendue, mais surtout des harmonies grandissimes qui plongent le groupe maintenant dans le cercle si petit des formations de death metal français qu’on écoute avec respect et non suffisance ni élitisme.
Et comme s’il fallait être sûr que les premiers écrits de VOORHEES ne restent pas dans l’oubli, le groupe se permet avec l'arrivée de Will à la batterie et de Seb à la guitare, de réenregistrer « Evil to come » qui prend une seconde jeunesse tellement plus en relief.
Point de brutalité outrancière ou de complexité troublante, VOORHEES joue dans la cour du death metal qui ne se confine pas aux ténèbres, mais du death metal à l’américaine des années 90’s dont le côté morbide était toujours lié à l’univers un peu cinématographique des Wes Craven de l’époque pour l’exemple, devenus des standards du genre aujourd’hui.
On n’est pas sur cet album dans le monde du death metal opaque, noir et vraiment fermé à tout ; au contraire, VOORHEES ouvre son death metal au monde, et arrive à proposer avec des titres d’une grande qualité comme « I’m the man who became god » (où l’on retrouve de nouveau cette chaleur au niveau des guitares, qui réchauffe et réveille votre mélomanie une fois de plus), un death metal classique certes mais sincèrement bien écrit, au point que le plat bien que connu, éveille encore les papilles dans la bouche et les met en émoi sur la langue afin de mettre en avant cet umami aujourd’hui oublié. Une langue qui lorsqu’elle n’est pas putassière ou pleine d’excréments, n’a aujourd’hui plus que le gout des factures salées, de l’amertume sociétale, de la sucrerie sournoise pour mieux faire remonter l’acidité gastrique.
Pas une rature, pas un faux pas, cet album est bien construit, bien équilibré, entre la voix de Chris pleine de graviers, un son de batterie/basse de gaulois ( « Reanimated »), et également des accélérations sur « Voorhees II » qui ne laissent pas repousser le poil après l’avoir arraché ainsi qu’un lead guitare qui envoie le sang dans le bas ventre, VOORHEES réalise un album de death metal traditionnel qui ne laisse pas de marbre parce qu’ils ont su donner vie à leurs morceaux, avec une couleur chaleureuse qui fait que l’album en entier en est surprenant d’efficacité jusqu’à « Into darkness », sauf pour ceux qui veulent nager dans la caviar bien entendu.
Ce « chapter two » mérite sa place dans le livre, c’est une évidence.
Arch Gros Barbare
31/01/2020