27 mai 2023
Groupe : ASILE OBSCENE
Titre : Horribilis Sanctum
Label : Cabale Prod
Année : 2023
Dans la pièce la plus glauque, de l’habitation la plus sordide, de la ville la plus morte d’une région la plus reculée est né dans la douleur, parmi les décombres et les cadavres en décomposition, un album qui ne devait pas voir le jour.
Des années durant, l’horreur grandissait dans le noir, prenant chaque journée un peu plus, l’odeur de la chair purulente pour mieux ré-ouvrir des plaies suintantes d’où s’extirperait huit artéfacts réservés aux âmes damnées, huit incantations brutales, parasites non désirés d’une terre brûlée par une humanité déraisonnée.
ASILE OBSCENE gardait bien cachées ses compositions afin de trouver après moult combinaisons, celle qui comme le cube des lamentations, vous apporterait dans la jouissance musicale et la torture sadique, un album construit comme ce fameux casse-tête sophistiqué et infernal que pouvait transporter le plus célèbre des cénobites, mais dont Karkass a pris la place.
« Horribilis Sanctum » a mis longtemps à sortir des entrailles de l’enfer, mais c’est juste parce que la destruction du monde ne se fait pas en un claquement de doigts, et pour ce faire, il fallait aussi le talentueux Stephane Elkine (Smashed-Iron Slaught-Deadly Whispers…) pour donner à cette œuvre du démon la véritable couleur du sang.
On n’écoute pas « Horribilis Sanctum » comme un album qui dure trente quatre minutes, non, on écoute cet album comme on lit un livre.
D’une part les visuels d’OceaneOne DarkArt Creations mettent en exergue la folie incompréhensible et totalement dévastatrice des esprits malins qui ont composé ces huit titres, et ensuite les samples pleins de noirceur et d’invocation enrobent les victimes avec une aisance malsaine et glauque afin de donner aux notes une matérialisation morbide adéquate. C’est ainsi que « Horribilis Sanctum », titre finalement plus ou moins instrumental mais horrifiquement cinématographique, nous ouvre le royaume des morts et l’on aperçoit à travers les ronces, qu’ils sont la fin du monde.
Une fois à l’intérieur de l’autre monde, ASILE OBSCENE s’affirme en Maître de Ténèbres rapidement, et on prononce au fur et à mesure les psaumes du Necronomicon pour découvrir les morceaux pas à pas puisque « Nightmare for all » que bon nombre avait pu écouter sur la toile depuis longtemps, confirme la violence de leur death metal qui embrasse de son baiser de mort un death/thrash agressif et totalement ancré dans les atmosphères des 90’s.
Quelque part entre Malevolent Creation et toute son évolution de carrière, ainsi qu’un death metal parfois moins traditionnel mais plus brutal à la Old Deicide, ASILE OBSCENE raconte des histoires comme celle de « Eat your guts » et son incantation vaudou. Il est des albums à écouter en plusieurs fois, mais la particularité d’« Horribilis Sanctum », c’est que l’on écoute cette œuvre d’une seule traite, parce qu’il n’est pas particulièrement long, et que les titres sont enchevêtrés les uns aux autres, ne faisant qu’un.
En traversant les caves lugubres d’un « Depraved Orgasm after life » où le tempo devient pesant et que les guitares saignent des cordes, sur un sol parfois trop sale pour le regarder, ce n’est qu’une fois la porte fermée qu’ASILE OBSCENE vient asséner son coup de scie égoïne rouillée dans le dos des auditeurs pour balancer toute sa haine avec un titre tel que « Artefact of damned souls » où la voix de Nikrass (Zoldier Noiz, Iron Slaught), fait son office de Ténèbres à la manière d’un Benton déchaîné.
Les guitares hurlent comme des chiennes des enfers sur « Abyssal drakkar », tandis que les rythmiques de « Come from your grave » résonnent comme des machines de guerre impitoyables et nous rappellent les meilleures années du death metal américain. C’est sans doute sur les guitares de ce morceau uniquement qu’on trouvera une proximité tout à fait anecdotique avec leurs compères de Smashed.
ASILE OBSCENE dégage quelque chose de puissant tout en lâchant sur le monde la terreur dont il a besoin pour en finir avec lui-même. Et quoi de mieux que de terminer en apothéose sonore, avec « Excisorius Obscurum » qui se veut être une outro tout autant maléfique et cinématographique que pouvait l’être « Horribilis Sanctum ».
Plus qu’un album, sans être un concept, « Horribilis Sanctum » rend hommage à toute une époque avec un death metal proche de ses racines et de son univers . ASILE OBSCENE aura mis le temps, mais c’était pour mieux nous entrainer dans sa nécropole souterraine, et ainsi offrir aux exclus , aux enfants de la nuit un univers personnel comme Clive Barker avait su le faire.
Arch Gros Barbare
27/05/2023